Un océan sain, condition sine qua non pour un monde durable. Un océan sain, condition sine qua non pour un monde durable. Un océan sain, condition sine qua non pour un monde durable. Un océan sain, condition sine qua non pour un monde durable. Un océan sain, condition sine qua non pour un monde durable

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01 Décembre 2022

Un océan sain, condition sine qua none pour un monde durable

Forum, Durabilité
Adresser le problème de la pollution est inévitable ; comprendre les mécanismes de capture de carbone et de production d’énergie par les océans est vital ; mieux connaître sa biodiversité pour mieux la préserver est essentiel.
L’océan constitue l’écosystème le plus vaste de notre planète. Il recouvre 71 % de la Terre. Il est omniprésent, incontournable. Les deux tiers de la population mondiale vivent à proximité des rivages ! Le commerce mondial lié à l’océan est estimé à 2'500 milliards de dollars par an (sources WWF 2018). Les deux tiers de ce chiffre dépendent d’un océan en bonne santé. L’océan absorbe 30 % des émissions de CO₂ de l’homme et contribue largement à stabiliser le climat. Près de 900 millions de personnes dépendent directement des ressources côtières pour se nourrir (2020). L’océan offre des activités culturelles et récréatives innombrables. Bref, il est essentiel au bien-être de l’homme, mais, bien au-delà de cela, il est vital pour l’équilibre de tout l’écosystème planétaire. Pourtant, sa condition se détériore dangereusement chaque année.
Nous avons déjà perdu 50 % des récifs coralliens et des mangroves – deux des habitats naturels les plus productifs sur terre. De nombreux stocks de poissons sont à la limite de l’épuisement, entraînant des conséquences désastreuses sur de nombreuses autres espèces marines comme les tortues, les dauphins, les baleines ou les oiseaux marins. La pollution (plastique, hydrocarbures et agrochimie) contamine toute la chaîne alimentaire. Le changement climatique réchauffe et acidifie les océans.
Un « continent » de plastique équivalent à trois fois la France continue de croître dans le Pacifique Nord.

Nous atteignons un seuil critique, à tel point que les Nations unies ont déclaré la Décennie (2012-2030) pour les sciences océaniques au service du développement durable. Adresser le problème de la pollution (plastique, mais aussi sonore) est inévitable ; comprendre les mécanismes de capture de carbone et de production d’énergie par les océans est vital ; mieux connaître sa biodiversité pour mieux la préserver et partager les informations le plus largement possible est essentiel. Quels sont les axes les plus importants à développer pour y arriver ? L’innovation technologique peut-elle aider ? Plongée dans le monde de l’écoresponsabilité vue des océans.
En 2022, les émissions carbones seront en hausse de 1 %, alors qu’elles devraient être réduite de 5 % à 10 %.

Lutte contre la pollution

D’après l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la production annuelle de déchets plastiques est passée de 156 millions de tonnes (Mt) en 2000 à 353 Mt en 2019. À peine 9 % des déchets sont recyclés. Plus de 11 Mt de plastique sont déversées dans les océans chaque année, asphyxiant la faune marine, détruisant les écosystèmes marins et empoisonnant toute la chaîne alimentaire. Le problème est donc loin de se résorber. Aujourd’hui, un « continent » de plastique, dont la superficie de 1,6 million de km² représente presque trois fois celle de la France, continue de croître dans l’océan Pacifique nord. Quatre autres existent également dans l’océan Pacifique sud, l’océan Atlantique (nord et sud) et l’océan Indien.
Solar Impulse, la fondation de Bertrand Piccard, propose de nombreuses solutions viables et durables pour la protection des océans. En voici deux qui semblent simples et efficaces. Blue Barriers met en place des barrières de collecte des déchets plastiques en amont de l’océan, dans les rivières. Le simple débit de l’eau permet d’accompagner les déchets plastiques dans un bassin de collecte pour y être retirés et recyclés. Ces dispositifs permettent de collecter 100 % du plastique dans des conditions normales. Ainsi, ils protègent les écosystèmes tant fluviaux que marins, améliorent la vie des populations locales et préservent à long terme le potentiel de pêche et de tourisme.
L’autre innovation s’attelle au nettoyage des océans directement. Collectix est un bateau-poubelle qui permet de récolter jusqu’à 20 tonnes de déchets par jour tout en respectant la biodiversité. Cette solution combine l’utilisation d’un bateau et d’un drone, qui travaillent ensemble pour identifier les points chauds des déchets et les collecter de manière efficace. De plus, le bateau transporte des capteurs permettant de collecter des données, informations cruciales pour la recherche. Le plastique collecté est recyclé et peut être utilisé pour fabriquer des produits ou des matériaux de construction.
Mais il faut aussi s’attaquer à la source : réduire ou éliminer complètement les plastiques à usage unique. L’entreprise Notpla a mis au point un matériau innovant à base d’algues et de plantes. Totalement biodégradable, il permet de remplacer bon nombre d’emballages plastiques. Leurs « bulles » mangeables en algues, contenant de l’eau, ont créé le buzz lorsqu’elles ont été lancées au marathon de Londres en 2019. D’autres marathons ont suivi, et l’entreprise propose désormais quantité d’autres solutions pour les boîtes de livraison de plats, pour des emballages rigides – comme ID Genève l’a introduit au salon Re-Luxury à Genève début novembre 2022. La matière première est abondante, naturelle, à croissance rapide et s’inscrit dans une circularité parfaitement durable et responsable.
Ces transformations resteront anecdotiques si les États ne prennent pas le problème à bras-le-corps. Il semble que les choses commencent à évoluer en ce sens. Ainsi, les 175 pays membres des Nations unies ont voté, en mars 2022, en faveur de la création d’un traité mondial de lutte contre la pollution plastique, qui passe notamment par une reconnaissance du plastique comme préoccupation majeure pour l’environnement, la santé humaine et la vie marine. La résolution appelle à une production plus raisonnée du plastique, à un développement soutenu des filières de recyclage et à la création d’alternatives plus respectueuses de l’environnement. Les négociations devraient aboutir d’ici fin 2024. Le temps presse !
L’autre axe à développer concerne le transport maritime et la pêche. En effet, une étude de The Ocean Cleanup révèle que le vortex du Pacifique nord est constitué entre 75 et 86 % des déchets de l’industrie de la pêche. Celle-ci doit donc être régulée strictement au plus vite. De même, le transport maritime doit être repensé. Il faut savoir que le transport maritime opère 90 % des échanges mondiaux de marchandises. Son impact sur la santé des océans est important en termes de pollution : 300'000 tonnes d’hydrocarbures déversées par an (source : agence-france-electricite.fr), mais ce n’est que 10 % de cette pollution spécifique (les puits de pétrole en mer génèrent bien plus de « marées noires »). Son impact est plus large au niveau de la pollution de l’air : 5 % des émissions globales de CO₂ (source : Organisation maritime internationale). Et ce n’est pas tout. En termes de destruction de la biodiversité, 70 % des cétacés meurent par collisions, entraînées par la pollution sonore induite par le transport maritime. Des solutions pratiques simples existent. Il faut élargir les zones de contrôle à l’Asie (mer du Japon) et à la Méditerranée, réduire la vitesse des navires à 10 nœuds (12 nœuds actuellement) pour baisser les émissions de GES de 30 %. Solar Impulse a aussi identifié d’autres solutions, avec notamment Bound4blue, qui a créé une voile pliable inspirée de la technologie de l’aviation pour maintenir la vitesse du navire en limitant la propulsion du moteur, réduisant ainsi les émissions de 10 à 30 %.
Cependant, au final, la solution la plus simple serait de réduire le nombre de bateaux sur les océans pour aller vers plus de sobriété, de consommer localement afin de réduire au maximum les effets néfastes liés au transport et de « penser circulaire ». Les scientifiques du monde entier le clament depuis des décennies : sans réduction de la production de plastique, sans filières de recyclage adaptées, et sans réglementation sur les différentes industries, le continent de plastique continuera de croître.

Séquestration de CO₂ et production d’énergie bleue

Les océans produisent plus de 50 % de l’oxygène que nous respirons. L’océan est notre « puits de carbone » le plus efficace. Il est donc essentiel de s’assurer qu’il continue à réguler notre climat efficacement. Le constat d’une augmentation en température et de l’acidification accrue des océans démontre cependant que ses facultés d’absorption de carbone sont proches de leur limite maximale. La capacité des océans à séquestrer le carbone de l’atmosphère est essentielle dans la lutte contre le dérèglement climatique. En 2022, d’après les dernières évaluations du Global Carbon Project, nous émettrons 40,6 milliards de tonnes de CO₂ : + 1 % par rapport à 2021, alors que nous devrions réduire celles-ci de 5 à 10 % par an afin de ne pas dépasser + 1,5 °C d’augmentation de température globale, objectif sur lequel nous nous sommes engagés dans l’accord de Paris de 2015.
Les marais salins, les mangroves et les herbiers marins captent dix fois plus vite le CO₂ et en stockent cinq fois plus par hectare que les forêts tropicales. En plus de développer la vie marine et de subvenir aux besoins des populations côtières, les écosystèmes côtiers (récifs coralliens inclus) représentent près de 50 % du carbone séquestré par les océans. Le concept de carbone bleu – la séquestration et le stockage du carbone par l’océan – a donc un rôle à jouer primordial dans l’équation. Une piste prometteuse est la mise en place de fermes de kelp, une algue de mer à la croissance rapide qui absorbe 20 fois plus de carbone qu’une plante terrestre de même taille. Oceans 2050, une initiative cofondée par la petite-fille de Jacques-Yves Cousteau, multiplie les études sur le potentiel de ces algues en vue de restaurer la santé des océans.
Les fermes de kelp ne représentent actuellement qu’une capture carbone de 640 Mt, environ 10 fois moins que la séquestration des forêts terrestres. Mais le potentiel est intéressant et les avantages en parallèle sont nombreux. Le kelp améliore la qualité de l’eau, encourage la biodiversité et réduit l’acidité locale de l’océan. La culture du kelp n’utilise ni engrais, ni pesticides, ni eau douce, et peut faire travailler les femmes facilement dans les pays en développement. Pour Carlos Duarte, responsable scientifique de Oceans 2050, les fermes de kelp peuvent jouer un rôle vital dans la sauvegarde des océans et la lutte contre le changement climatique. Il envisage 4 millions de km² de fermes (2'000 fois la surface actuelle), qui créerait un vaste écosystème florissant pour des millions de poissons et pour toutes les populations côtières.
L’océan est aussi une formidable source d’énergie. En effet, les vagues et les marées font de l’océan une ressource d’énergie inépuisable. Solar Impulse identifie de nombreuses solutions de cet ordre. Ainsi, WaveRoller est un convertisseur de vagues oscillantes qui produit une énergie renouvelable constante à partir des vagues de l’océan. Le projet permet de convertir cette énergie de manière durable et de diversifier le mix énergétique d’un pays. Le dispositif d’énergie houlomotrice permet d’exploiter l’énergie des vagues à proximité des côtes. Compte tenu de la proximité des rivages des populations, la mise en œuvre de cette solution permettrait un accès direct à l’énergie pour répondre à la demande. Le prix de l’électricité serait similaire à celui de l’énergie éolienne. Enfin, en agissant uniquement sur les berges et la surface de l’eau, ce dispositif n’a pas d’impact négatif sur la biodiversité. L’océan offre ainsi des solutions simples, basées sur la nature elle-même, qu’il serait bon de comprendre et de multiplier.

Préservation de la biodiversité

Les scientifiques s’accordent à dire que nous ne connaissons que 5 % de la biodiversité océanique. Trouver des solutions pour veiller à la préservation de ces écosystèmes constitue un défi majeur pour le monde scientifique. Nous avons vu le rôle essentiel des écosystèmes côtiers, cependant ils sont de plus en plus soumis à des tensions et des destructions aux conséquences dévastatrices. L’un des exemples les plus marquants est celui des récifs de coraux. Au cours des 30 dernières années, 50 % de ceux-ci sont morts, et plus de 90 % sont en voie de disparition d’ici 2050. Solar Impulse a identifié plusieurs innovations pour renouveler ces récifs. Coral Vita crée des fermes de récifs coralliens… sur terre. Cela permet de les faire pousser jusqu’à 50 fois plus vite, tout en améliorant leur résistance au réchauffement et à l’acidification des océans.
Un autre aspect non négligeable à considérer est le problème de la surpêche. En effet, chaque année, 30 % des stocks de poissons pêchés le sont de manière excessive. De plus, les techniques de pêche capturent plus de 38 millions de tonnes de poissons non commercialisés (sur les 100 millions de tonnes pêchées par an). Cette institutionnalisation de la surpêche a entraîné la large baisse du nombre d’espèces marines constatée depuis 40 ans. La science a un rôle à jouer essentiel en améliorant les connaissances des stocks halieutiques, des effets des pollutions marines et des techniques désastreuses pour l’environnement. Cette industrie doit absolument être régulée et contrôlée davantage à l’avenir.
De même, des projets tels que MapBiomas ou Global Water Watch, qui utilisent l’intelligence artificielle et le machine learning, permettent de fournir des données précises pour mettre en perspective les conséquences du changement climatique et prendre les décisions qui s’imposent pour y remédier. Mettre ces informations à disposition du plus grand nombre, partager les expériences, collaborer à grande échelle sont autant de moyens pour lutter pour la préservation des océans.

CCL

Tous les projets et chantiers évoqués ici ont besoin de financements. Le GIEC le crie haut et fort depuis des décennies : il est primordial d’arrêter d’investir dans les énergies fossiles et d’orienter ces flux monétaires vers des solutions viables pour la planète. Ce ne sont pas les solutions qui manquent, basées sur la nature elle-même ou sur la science, mais bien la volonté des entreprises et des politiques. Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas. La Sustainable Ocean Alliance l’exprime clairement : « Il est temps de changer notre vision de l’océan. Il ne doit plus être une source d’où l’on peut prélever ce que l’on veut et dans laquelle on peut déverser ce que l’on ne veut plus, mais une ressource commune d’une valeur immense à préserver. »
Comprendre l’interdépendance entre le climat, les écosystèmes (dont l’océan) et les sociétés humaines est essentiel. Car un tel bagage débouche sur une évidence : si l’océan se meurt, c’est toute la vie sur terre qui est menacée. Comme le disait Victor Hugo : « Il vient une heure où protester ne suffit plus ; après la philosophie, il faut l’action. » Il est grand temps d’agir !