FHH | Comprendre les fuseaux horaires multiples et le GMT

Fuseaux horaires et GMT

Complications

Thématique Complication

Dans la plupart des cas, les montres à deux fuseaux n’ajoutent à l’affichage de base qu’un indicateur des heures pour l’heure de domicile.

En 1954, Rolex lance la GMT-Master, une pièce qui préfigure l’ensemble des montres GMT qui vont suivre.

Définition

Une montre GMT, à double fuseau horaire ou à multiples fuseaux horaires – selon l’appellation des marques – est une montre capable d’afficher simultanément deux ou plusieurs fuseaux horaires. Une telle complication permet ainsi à l’utilisateur de disposer de l’heure locale (« local time » ou « travel time »), tout en conservant l’heure de son domicile (« home time »), voire celle d’un troisième lieu sur la planète. Cette fonction s’accompagne très souvent d’un indicateur jour/nuit ou d’une graduation auxiliaire sur 24 heures, qui renseigne sur l’âge de la journée là où l’utilisateur n’est pas.

Description technique

La fonction GMT (pour Greenwich Mean Time) – appelée aussi « double fuseau horaire » – permet aux voyageurs de conserver sur leur montre l’heure de son domicile (« home time »), tout en disposant de l’heure de l’endroit où ils se trouvent (« local time » ou « travel time »). Une montre à multiples fuseaux horaires est en outre capable d’afficher une troisième, voire une quatrième heure, correspondant à autant de points différents de la planète. Une telle complication est donc utile lorsque l’on se déplace à travers le monde – au contraire d’une montre à heures universelles, laquelle renseigne en permanence sur l’heure de 24 villes (« local time ») lorsque l’on se trouve à un endroit fixe de référence (« home time »).

Dans la plupart des cas, les montres à deux fuseaux n’ajoutent à l’affichage de base qu’un indicateur des heures pour le « home time », dans la mesure où les décalages horaires se comptent généralement en heures entières. Mais afin de prendre en considération la situation particulière d’un petit nombre d’États décalés de 15, 30 ou 45 minutes par rapport à leur fuseau respectif, quelques modèles de montre sont également équipés d’indicateurs supplémentaires des minutes. Sur ces pièces, il est ainsi possible de régler le « home time » à la minute près.

Bien souvent, le « local time » ou « travel time » est indiqué par les aiguilles centrales des heures et des minutes. L’utilisateur doit donc procéder à un nouveau réglage à chacun de ses déplacements. Pour lui faciliter la tâche et afin de ne pas perturber la bonne marche du mouvement, un dispositif permet de ne manipuler que l’aiguille des heures, en avant et en arrière, à l’aide soit de la couronne, soit de boutons-poussoirs +/–.

Montblanc - 1858 Geosphere -Limited edition

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En ce qui concerne le « home time », les horlogers ont développé de nombreux systèmes d’affichage. Les principaux sont : une ou plusieurs aiguilles des heures supplémentaires sur le cadran central, esthétiquement différentes de celles dévolues à l’affichage local ; un deuxième – ou plusieurs – cadran indépendant, indiquant les heures, voire les minutes ; un indicateur supplémentaire des heures dans un guichet ; ou encore une graduation additionnelle sur 24 heures, sur une lunette, un cadran ou un rehaut tournant. Cette dernière solution peut venir en complément à l’un des systèmes précédents, de manière à ajouter un fuseau supplémentaire. De rares modèles proposent également un système de sélection de villes : le nom du lieu apparaît dans un guichet, en même temps que la ou les aiguilles du « home time » se règlent automatiquement.

De plus, l’utilisateur doit pouvoir savoir s’il fait jour ou nuit à l’endroit où il n’est pas. Un système « home time » qui ne possède pas un affichage sur 24 heures doit donc être complété d’une indication jour/nuit – nommée aussi « day/night » ou « AM/PM », selon les modèles – ou d’un compteur complémentaire sur 24 heures.

Du point de vue technique, certaines montres à multiples fuseaux horaires présentent plusieurs cadrans distincts, chacun doté de son propre mouvement. Cette solution n’est pas considérée comme une complication, dans la mesure où la conception de chaque mouvement reste basique. À l’inverse, un second indicateur sur 12 heures nécessite la connexion d’une roue de GMT sur la roue des heures. Les deux fonctionnent de manière synchronisée, mais la première est dotée d’un système de débrayage, lequel permet le réglage du « local time » sans interférer sur le reste de l’affichage. Dans le cas d’un indicateur sur 24 heures, un pignon de réduction permet de faire tourner la roue de GMT deux fois plus lentement que la roue des heures. Enfin, un rehaut ou une lunette tournante graduée sur 24 heures s’utilise de la manière suivante : une fois le « local time » réglé, l’utilisateur vient placer la valeur correspondant au « home time » en face de l’aiguille des heures.

Historique

Avant la fin du xixe siècle, le monde connaît des milliers d’heures locales différentes. Isolées les unes des autres, chaque ville, chaque région fonctionne avec son propre temps, calculé sur la course du Soleil (heure solaire ou heure vraie). Se déplacer, n’était-ce que sur quelques kilomètres, obligeait le voyageur à changer de référent horaire, et donc à régler sa montre sur l’heure solaire locale.

L’avènement du chemin de fer aux États-Unis à partir de 1830 avec la ligne Baltimore-Ohio, puis en Europe en 1838 avec la liaison Londres-Birmingham, de même que le développement du télégraphe grâce à Samuel Morse (1791-1872), va bientôt multiplier – et surtout accélérer – les échanges entre villes et entre pays. La multiplicité des heures locales devient dès lors inappropriée. L’extension des réseaux ferrés d’est en ouest ainsi que la diversité des compagnies ferroviaires conduisent à l’universalisation de l’heure. En 1883, les compagnies américaines et canadiennes scindent ainsi leur territoire en cinq zones égales, introduisant du même coup la nouvelle notion de « fuseau horaire ». Un an plus tard, la Conférence internationale de Washington instaure le partage du globe terrestre en 24 fuseaux d’une heure, avec comme référence le méridien de Greenwich – appelé également « méridien zéro ».

L’heure GMT – Greenwich Mean Time – est alors adoptée comme base de temps civil. Calculée sur le temps solaire vrai de Greenwich, elle servira également à la conquête des airs. Plus que ne l’avaient déjà fait les chemins de fer au xixe siècle, les vols long-courriers du xxe siècle vont en effet raccourcir davantage encore les distances, au point de provoquer la confusion dans les repères temporels. L’heure GMT devient donc la référence des pilotes et des aiguilleurs du ciel, qui s’en servent pour le calcul des plans de vol.

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En 1940, le modèle Aéro-Compax d’Universal est le premier chronographe à avoir été développé à la demande de pilotes, en l’occurrence brésiliens. Doté de totalisateurs 30 minutes et 12 heures, il est également muni d’un cadran indépendant à 12 h. Celui-ci permet de mémoriser, par une couronne à 9 h, une heure spécifique grâce à une deuxième aiguille des heures et des minutes. Cependant, ce cadran auxiliaire reste fixe, car il n’est pas connecté au mouvement de la montre.

En 1954, Rolex lance la GMT-Master. Cette pièce préfigure l’ensemble des montres GMT qui vont suivre. Développée en partenariat avec la compagnie Pan American World Airways – plus connue sous le nom de Pan Am –, elle dispose d’une deuxième aiguille des heures au centre, en forme de flèche. Indiquant le « home time », elle effectue une rotation complète en 24 heures, dont la graduation apparaît sur la lunette. L’autre aiguille des heures, quant à elle, est manipulable indépendamment grâce à un système de débrayage.

Dès cette date, de nombreuses marques vont proposer des montres à double ou multiples fuseaux horaires : en 1955, Heuer présente la Twin-Time sur le même modèle que la GMT Master, à la différence que la deuxième aiguille des heures tourne sur 12 heures ; en 1969, Omega lance le premier chronographe équipé d’une aiguille GMT, la Flightmaster ; en 1982, Rolex réédite son modèle historique sous le nom de GMT-Master II ; en 1994, Ulysse Nardin est la première à développer deux boutons-poussoirs pour le réglage indépendant de l’aiguille des heures de sa GMT±.

Depuis 1972, le temps GMT a été remplacé par le temps UTC (Temps Universel Coordonné), qui utilise comme base de calcul le temps atomique international. Malgré cela, les horlogers ont continué à employer l’acronyme GMT pour leurs montres à double ou multiples fuseaux horaires.